Interview de Cristele Bernard de l’association « Les Fleurs d’Aurore »
Posté le 16 décembre 2020 dans Actualites
L’association les Fleurs d’Aurore est une association d’activités sportives et de bien-être créée par les femmes, pour les femmes. L’association est née en 2015 à Drancy et elle a été affiliée pour la première fois en 2018 à la Fédération Française Sport pour Tous. Depuis, on se développe de plus en plus avec un développement partenarial conséquent et l’obtention des licences sociales en 2019, ce qui a permis de rassembler tous les publics, y compris les plus démunis.
Donc l’association évolue comme ce que vous imaginiez ?
Effectivement, elle se développe et se professionnalise ! Au début, il n’y avait que des bénévoles, notamment la présidente, danseuse et maquilleuse professionnelle. Elle menait des activités qui rassemblaient des femmes, malades ou en bonne santé. Les projets se développaient et nous avions besoin de professionnels nous permettant de répondre à des activités physiques adaptées à toute sorte de pathologie. Nous avons donc choisi la Fédération Française Sport pour Tous qui convenait le mieux au niveau des valeurs que l’on prônait. Elle nous a permis de former des bénévoles, et de trouver des éducateurs diplômés pour structurer au mieux l’association.
L’objectif de notre association c’est d’intégrer toutes les femmes, on ne catégorise pas les personnes qui sont accueillies, on adapte des activités sportives pour toutes. (C’est aussi pourquoi on a été subventionné dans le cadre de projets de santé innovants par l’ARS.)
Actuellement quelles sont vos propositions d’activités physiques sportives ?
Alors il y a deux choses :
-Des activités sportives en salle : fitness, renforcement musculaire, expression corporelle, danse. La ville de Drancy nous met à disposition la salle de la Maison Orange : le lundi de 19h à 21h, puis le mardi, jeudi et vendredi de 14h à 16h.
-Des activités randonnées pédestres, deux samedis par mois, toujours pour les femmes. Cela permet de faire des activités en dehors, de s’ouvrir à l’environnement et de visiter la région. C’est une activité qui ne coûte pas cher et qui permet de s’autonomiser dans le sport.
Les femmes apprennent à pratiquer une activité régulière, c’est une amélioration du cadre de vie.
J’aimerais vous parler d’une autre activité importante pour l’association :
-L’atelier de thérapie qu’on appelle le « Thé-rapie », qui est le lundi matin. C’est un moment de discussion de 3 à 4h autour de problématique de santé, de maladie, d’accès aux soins et de droits aux soins. En partenariat avec la Ligue contre le Cancer, l’Agence Régionale de Santé et les Hôpitaux de Paris, des consultantes peuvent venir pour parler de l’estime de soi, de la charge mentale, des violences faites aux femmes et de la priorité à soi.
Quel est le public accueilli lors de vos activités ?
On a un public mixte qui intègre des personnes de toutes conditions sociales, en bonne santé ou avec toutes sortes de pathologie (cancer, obésité, handicaps, isolement, dépression, diabète…). Cette mixité est très importante pour nous car chacune apprend de l’autre et renforce sa capacité d’action, de soin et de prise en charge en termes de prévention ; l’important pour nous est que ces femmes ne soient pas réduites à leur pathologie ou leur condition sociale. Il y a à peu près entre 140 et 180 adhérentes.
Il n’y a que des femmes, mais, 5 fois par an nous ouvrons nos activités pour des randonnées familles qui sont ouvertes aux autres membres de la famille (enfants, pères…). Souvent, ils sont étonnés de voir que leurs mamans/femmes peuvent pratiquer une activité sportive de façon autonome et cela valorise les femmes au sein de leur famille. Dalila Noomane organise des challenges sportifs mixtes et ludiques et les résultats ne sont pas toujours et de loin, ceux que l’on croit ! C’est donc un véritable travail sur l’estime de soi et la place de la femme au sein de la famille.
Qu’est-ce qui intéresse ces femmes selon vous ?
On a un projet transversal de sport santé où l’on travaille de manière holistique sur l’estime de soi, sur le bien-être, sur le droit au soin, la prévention santé, sur la place de la femme au sein de la famille et dans la société. Il y a à la fois des activités physiques, mais aussi de bien-être, nous avons des temps de maquillage, de coiffure, de photos, de discussion, d’échanges, pour valoriser la femme et la remettre dans un cadre de vie positif (sociale et/ou professionnelle). Ces femmes accumulent beaucoup de difficultés et le fait de prendre du temps pour elles, de pouvoir se réapproprier du temps pour son corps, pour soi, pour sa famille, se relier à la nature lors des randonnées et des séjours sport et aventures… c’est très important !
A combien évalueriez-vous le nombre de bénévoles ?
Il y a 3 enseignantes sportives diplômées APA qui sont rémunérées pour les activités physiques et une dizaine de bénévoles qui accompagne lors des sorties, participent à l’organisation des temps fort avec la ville et les partenaires.
Comment vous êtes-vous adaptées durant le confinement ?
La présidente est une survivante de cancer et elle comprend tout l’intérêt des activités sportives, de bien-être et de prévention pour la santé. Elle a donc été très réactive, lors de la première semaine de confinement : il y a eu une répartition du matériel (ballon, élastique…) à chaque femme puis elle a continué les activités sportives et thérapeutiques via la plateforme Zoom. Lors du confinement, pour certaines, les activités sont devenus des ateliers familles ! Il y avait également beaucoup plus de monde sur les ateliers thérapies, les personnes ayant un fort besoin de sortir de l’isolement (presque 30 femmes connectées).
Il y avait aussi des sollicitations très importantes de nos partenaires (CPAM93, ARS, Ligue contre le Cancer, CINFO Idf, Hôpitaux de Paris, ville de Drancy, Conseil Départemental 93) pour informer sur les procédures de santé, par exemple sur les laboratoires qui faisaient des tests, la distribution des masques, l’accompagnement des personnes vers des professionnels de santé et les services hospitaliers… C’est important, car pendant le confinement, beaucoup de personnes ont arrêté de se soigner.
Et après ?
A la fin du confinement, un séjour sportif s’est organisé en Savoie. Ces longs séjours que nous organisons tous les ans, sont importants car on se rend compte des problématiques plus intimes des femmes et on peut les accompagner au quotidien. On est dans le cœur de la prise en charge physique et mentale des femmes. Par exemple, une jeune femme en surpoids a participé ; nous nous sommes rendu compte qu’elle avait des problèmes urinaires. Elle s’est déjà rendu compte qu’elle pouvait faire du vélo et du renforcement musculaire pour pallier à ces problèmes, mais elle a été aussi accompagnée dans sa prise en charge vers des professionnels de santé adaptés. C’est lors de ses séjours que l’on peut travailler profondément sur l’alimentation, l’environnement et la prévention santé.
L’association a également dès la sortie de confinement intensifié ses activités à travers les ateliers réguliers pour les femmes et en partenariat avec la fédération Sport pour tous l’organisation de 67 ateliers sportifs pour les enfants et les adolescents dans les parcs de Drancy et à Bobigny.
Quelles seraient selon vous les valeurs véhiculées par votre association ? Sont-elles en adéquation avec vos valeurs ?
On défend des valeurs de mixité sociale et d’accès à la santé par le sport et pour les femmes, c’est une vision sur le long terme. C’est pour ça que j’interviens avec cette association qui travaille sur le fond des problèmes et tente de faire bouger les lignes institutionnelles.
Quels sont les projets en prévision ?
On va commencer cette année des ateliers Diabet Action + pour les personnes en surpoids et diabétiques, et Sport santé +, ces deux programmes passerelles sont développés par la fédération Sport pour tous.
La nomination de la Présidente Dalila Noomane, par les directeurs du GHU (Hôpitaux de Paris) pour siéger à la Commission centrale de concertation des usagers (3CU) ainsi que le développement de notre réseau avec des professionnels et institutions de santé diversifiés, vont permettre nous l’espérons, d’améliorer la prise en charge des femmes et leurs familles par des professionnels adaptés, l’accès au soin, et la prévention santé.
Nous sommes également depuis un certain temps maintenant en recherche active d’un local associatif afin de pouvoir stocker notre matériel sportif et de bien-être, accueillir et accompagner les personnes au mieux et développer nos activités. Nous espérons avoir un soutien des collectivités locales rapidement.
Pensez-vous qu’il y ait un impact au niveau géographique généré par les actions de votre association ?
Même si on est apolitique, on essaie de faire bouger les lignes et d’agir sur le terrain, pratiquement, tant dans l’accès au sport pour les femmes et pour tous, au droit au soin, à la santé que pour un meilleur cadre de vie à travers une meilleure alimentation et l’accès à la nature (alimentation, problème endocrinologique, obésité, environnement et écologie). Les filières alimentaires, écologiques, locales, sont à développer et à démocratiser.
On a aussi tissé un réseau partenarial qui nous permet d’avoir un ancrage territorial conséquent. Avec ce tissu institutionnel et associatif on peut avoir plus d’adhérents, plus d’activités financées et soutenir ainsi nos objectifs qui se développent en partenariat notamment avec le Comité Régional Sports pour Tous Île de France. La crise sanitaire actuelle nous a permis de constater, sur un département comme le nôtre (93), très touché par la Covid-19 et qui a déjà des impacts fort de mortalité et de non prises en charge des soins courants, que le sport santé et l’alimentation jouent et joueront un rôle primordial.
Qu’est-ce qui pourrait donner envie à de nouvelles personnes de vous rejoindre ?
Toutes les femmes et personnes qui souhaitent améliorer leur santé, leur cadre de vie, avoir du soutien pour prendre soin de soi seront bien entendu les bienvenues et accompagnées au sein de notre association.
Le petit mot de la fin ?
Voir des femmes, mères d’enfants en situation de handicap, vaillantes dans la vie de tous les jours, mais qui n’ont pas l’habitude ou l’opportunité de se mettre en valeur, les voir se mobiliser dans cette association et acquérir de l’autonomie, de la fierté et le sens du leadership, c’est quelque chose qui est très fort. Oui c’est ce mot : le leadership ! L’envie de prendre sa place pour soi. On a gagné notre pari.
Contacts :
Dalila Noomane
Les Fleurs d’Aurore
Tél : 06 16 05 09 27
lesfleurs.daurore@yahoo.fr
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